Résonance ; Chronique, fascinant objet non identifié

Théâtre, danse, cirque, musique... même si ma liste n'est pas forcément exhaustive, je retiens souvent diverses catégories pour évoquer les formes d'art que je découvre sur scène. Problème : avec Résonance ; Chronique, je suis tombé sur un os ! Comment parler d'un spectacle où, accompagné de notes de guitare et de nappes électroniques, un récitant unique déclame un texte poétique sur un ton fluctuant et toujours captivant, de la confidence aux éclats de voix ? Je me suis dit que le plus simple était sans doute de poser la question aux artistes créateurs. Mais eux-mêmes s'interrogeaient encore...


C'est près d'un mois après avoir pu assister à une représentation de leur "objet sonore" que j'ai reparlé avec Fernand Catry et Johan Roussey. Le premier, comédien, ne m'était pas inconnu : je l'avais déjà vu interpréter un Macbeth charismatique et puissant, dans une relecture de la pièce de Shakespeare alors portée par la compagnie (grenobloise) du Contre poinG. En son acolyte, j'ai découvert un musicien inspiré, à l'origine de sonorités éclectiques et heureux d'avoir pu en partager quelques-unes avec le public du Midi/Minuit, une vingtaine de jours auparavant. J'ai de nouveau senti la belle harmonie entre ces deux talents, grands amis à la ville autant qu'évidents complices sur scène. Pour tout dire, qu'on puisse décider de classer Résonance ; Chronique dans l'une ou l'autre des petites cases des arts contemporains les préoccupe peu. L'important pour eux est que le spectacle qu'ils ont conçu soit notamment apprécié comme le fruit d'un long travail créatif.


Ce travail a été entamé sans idée précise de son aboutissement. Johan le confirme: "Nous n'avions pas décidé d'un format de spectacle à obtenir. Nous ne souhaitions pas que le résultat ressemble à telle ou telle chose". Le public restera donc libre de son interprétation : certains auront l'impression d'assister à un concert (mais où personne ne chante...), là où d'autres aimeront l'énergie d'une session de slam ou la force évocatrice d'un poème en prose, emporté par la musique et le son. Qu'importe : l'essentiel reste d'ouvrir en grand ses yeux et ses oreilles pour capter quelque chose de la belle relation artistique qui unit les interprètes de cet opus indéfinissable, anciens du Conservatoire et proches depuis une dizaine d'années. D'où, d'abord, "le plaisir de jouer ensemble" évoqué par Fernand. Une connivence qui s'avère tout à fait affranchie du moindre rapport d'ordre hiérarchique : chacun avait en fait sa "bulle créative" et a voulu la mettre en partage avec l'autre. C'est passé par plusieurs étapes : du travail en solo de chaque côté, des moments d'écoute réciproque et de collaboration véritable, des phases de recherche et d'ajustement des premières inspirations... et à partir d'influences diffuses et variées.


Dans cette démarche, évidemment, le public n'a pas été oublié ! Fernand et Johan se sont simplement laissé le temps d'aboutir à une forme intéressante à leur sens avant de chercher à revenir sur scène pour la soumettre aux regards extérieurs. Pour ma part, je n'aurai sûrement pas la prétention de les avoir compris, mais j'ai trouvé le fruit de leurs efforts fascinant - il me faut dès lors préciser que j'étais placé au tout premier rang de l'une des plus petites salles de spectacle que je connaisse à ce jour ! J'écris ces lignes tandis que les deux potes sont très prochainement attendus du côté du Chat Rose, à Meylan (cf. ci-dessous). Dans cet autre lieu, il se peut que Résonance ; Chronique suscite une émotion différente. Évidemment, c'est aussi à chacune et chacun de recevoir ce spectacle en fonction de sa propre personnalité. Une piste supplémentaire pour la réflexion s'ouvre devant la très belle affiche de l'événement, où d'épais faisceaux rouge et bleu matérialisent un chemin, sans jamais converger - un peu comme le feraient les feux de véhicules situés des deux côtés d'une autoroute. Finalement, que le spectacle tel qu'il est joué ne soit pas véritablement défini selon un genre particulier nous invite à le découvrir sans a priori et à le ressentir selon nos propres codes. C'est précisément l'intérêt de l'art vivant. Une forme de liberté dont on ne peut que se réjouir face au vaste monde culturel, encore très affecté par la crise sanitaire.

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Les dates à venir...
Fernand et Johan se produiront avec Résonance ; Chronique au Chat Rose de Meylan, les samedi 2 et dimanche 3 avril prochains. Deux représentations qui en appellent d'autres (cette année ?) : ils précisent qu'ils sont absolument autonomes sur le plan technique. Par ailleurs, on pourrait également les retrouver dans d'autres projets créatifs, chacun de leur côté...

... et mes remerciements !
Ils sont aujourd'hui destinés à Margaux Lavis, comédienne présentée mardi et auteure des photos qui illustrent cet article.

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